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Réflexions de Jean-Paul Héritier, représentant des contribuables siégeant dans une commission des impôts

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Vous trouverez ici des réflexions sur l’évolution du fonctionnement de la commission mais aussi quelques conseils aux sociétés devant passer en commission ainsi que des conseils de prévention.

Evolution du fonctionnement de la commission

L’administration fiscale s’appuie sur un cadre réglementaire détaillé et rigide. Le respect tatillon de la lettre revient à vider la commission de tout intérêt. C’était généralement le cas quand j’ai débuté en commission et j’ai failli me retirer d’une activité que je jugeais stérile. Je ne l’ai pas fait et force m’est de constater une amélioration progressive du fonctionnement grâce une prise en compte meilleure, encore que très imparfaite, des difficultés concrètes du métier d’entrepreneur.

A quoi est-ce dû ? Un peu, sans doute, à une évolution d’esprit de l’administration. Je regrette cependant l’hésitation des chefs de service à désavouer les excès de certains contrôleurs soit en période de recours hiérarchique, soit en commission. Beaucoup est dû à l’évolution de l’état d’esprit des juges qui président les commissions : moins de distance, plus de patience, plus d’écoute. Or, leur rôle est clé.

Je donnerais volontiers le conseil suivant aux nouveaux membres des commissions : évitez de vous placer dans une situation systématique de débat conflictuel entre une accusation, les représentants de l’administration fiscale, et une défense, vous. Visez plutôt l’esprit d’une réunion de travail où , suivant les sujets, il y a accord ou désaccord entre les participants. Ceci est plus facile à dire qu’à faire, mais vous devriez constater à terme une amélioration des résultats.

Vous devez passer en commission

L’administration émet un rapport qui présente son point de vue initial, vos réactions, ses commentaires sur vos réactions, que vous recevez comme les membres de la commission. Ce rapport ne peut être totalement neutre. Vous avez la possibilité de produire un mémoire à l’attention des membres de la commission.

Si vous décidez de produire un tel mémoire :

Ce qu’il ne faut pas faire, et qui se produit trop fréquemment :

un mémoire épais, difficile à connecter au rapport de l’administration, avec des montagnes de pièces jointes nouvelles, produit la veille de la réunion ou apporté en réunion, de façon qu’on ne puisse l’examiner au préalable. Ne cherchez pas à faire pire pour braquer la commission contre vous. Rassurez-vous, le résultat est atteint.

Ce que je vous propose de faire :

  • suivez l’ordre et la numérotation du rapport de l’administration pour qu’on puisse les analyser côte à côte : sinon, celui de l’administration servira de base
  • pas de discours généraux ni de reprise copieuse du rapport de l’administration pour faire du volume. Soyez concis et près des faits.
  • n’attaquez pas le contrôleur : vous créeriez un réflexe de défense
  • ce mémoire, adressez-le suffisamment tôt pour que les membres de la commission aient pu l’analyser avant la réunion : Vous n’imaginez pas le caractère désastreux pour l’entreprise, quand, le Président, ayant demandé en séance à l’inspecteur : « Avez-vous pris connaissance de ces nouvelles pièces, et quels sont vos commentaires ? » obtient la réponse : « Non, je les découvre aujourd’hui ».

La réunion de la commission se fait en deux temps : une phase plénière où la commission obtient le point de vue de l’entreprise, celui du contrôleur, et où les membres de la commission posent des questions pour obtenir un meilleur éclairage sur tel ou tel point, une phase de discussion hors de la présence de l’entreprise et du contrôleur.

Je me permets encore quelques conseils :

  • faites le tri, avant la réunion, des sujets sur lesquels vous voulez vous battre et de ceux que vous considérez comme secondaires ou moins solides. Sinon, la commission fera ce choix à votre place et ce ne sera pas le vôtre
  • ne coupez pas la parole à l’inspecteur et ne soyez pas agressifs. D’ailleurs, si vous estimez, dans un débat, que votre adversaire s’enferre dans une erreur, n’est-ce pas votre intérêt de laisser aller jusqu’au bout ?
  • n’hésitez pas à évoquer les difficultés pratiques de votre métier qui ont pu causer certaines déviations des règles. C’est une des raisons d’être de cette commission d’essayer de voir des réalités concrètes et pas seulement les règlements
  • pas de plaidoirie d’audience – je m’adresse aux avocats – cette commission statue sur des faits. Restons à ce niveau.

Quelques conseils de prévention

Certains sujets sont récurrents. Je n’imagine pas qu’on puisse les éliminer, du moins peut-on en réduire l’importance. J’en citerai trois et les remèdes que je propose relèvent dans les trois cas d’une même logique : écrire ce que l’on fait, même très simplement, dans un esprit d’assurance qualité.

Les provisions :

Exemple de dialogue de sourds : l’entreprise : « nous avons eu raison de passer cette créance puisque, l’année suivante, notre débiteur a déposé son bilan » ; l’administration : « non, puisqu’au moment où vous avez passé cette provision, vous n’aviez pas connaissance de ce dépôt de bilan ».
Je conseille – et ce n’est pas une panacée – d’annexer aux comptes annuels, une note justificative de la provision qui s’appuie sur des événements : nombre de relances, consultation de tiers, infogreffe ou équivalent, etc qui fasse que l’on puisse, certes, critiquer le montant de la provision, mais pas le fait que vous ayiez fait une analyse sérieuse.

Les notes de frais :

Peu importe la méthode que vous choisirez : du registre à la simple écriture au dos du justificatif, mais vous devez écrire l’objet de chaque note : client ( nom de la société et des personnes invitées et invitantes ), collaborateurs ( raison de la dépense : fête annuelle, célébration d’un succès, et le nombre, même approximatif, de participants), ou toute autre précision sur l’objet de la dépense, qui doit être engagée dans l’intérêt de la société. Le fait de régler par carte de crédit société ne permet pas d’échapper à cette règle.

Les impayés :

L’administration ne reconnaît les impayés que si la société peut justifier des efforts suffisants de recouvrement. D’une part il y a les impayés dont la modicité individuelle ne justifie pas une relance par recommandé, etc. Alors ayez une note de procédure où le chef d’entreprise explique cela à ses subordonnés en s’appuyant sur des éléments de coût. Il sera dans son rôle de gestionnaire. D’autre part, il y a les cas où on hésite, pour des raisons commerciales, à relancer par écrit un client important ou régulier. Alors, ayez un registre où on note : ai vu, ou téléphoné à, Mr X et ai parlé de la facture Y. Il m’a répondu …. Pas de grand texte ! Simplement le fait, daté.

Je ne puis garantir que ce genre de précaution suffise, mais je vous assure que ce genre de support nous aiderait bien en commission ! Et puis, si nous ne les voyons jamais, peut-être est-ce dû au fait qu’ils sont déjà utiles en amont ?

Dans ces notes que j’ai jetées sur l’écran, vous n’aurez trouvé rien de très intelligent, décisif, brillant ou même astucieux. Puissent-elles vous rappeler qu’une réunion de commission est un débat oral s’appuyant sur des pièces écrites. Aidez-nous !

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